Performance Performance

— Légende

Définitions

Brève définition des termes pour donner le cadre de leur portée théorique et disciplinaire.

Citations

Citations d’auteurs proposant des éléments de définition faisant consensus et provenant de sources bibliographiques.

Perspectives

Textes rédigés par des chercheurs/artistes à partir de l’expérience de leur terrain d’étude.

Bibliographie

Sources bibliographiques prolongeant les citations.

Définition

Au delà de son sens commun désignant un tour de force artistique ou sportif public, ou qualifiant le niveau d’efficacité ou de succès d’un être vivant ou d’un objet technique, la notion très polysémique de performance désigne depuis la seconde partie du XXe siècle à la fois une pratique artistique spécifique (performance art), un cadre d’analyse théorique pluridisciplinaire (performance studies).

Pour citer : « Performance », Performascope : Lexique interdisciplinaire des performances et de la recherche-création, Grenoble : Université Grenoble Alpes, 2021, [en ligne] : http://performascope.univ-grenoble-alpes.fr/fr/detail/177859

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Date de création : 2021-06-14.

Dernière modification : 2022-06-29.

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Perspective

Citation

Bibliographie

« Selon le point de vue adopté et le cadre théorique mobilisé, le mot « performance » peut désigner un genre artistique puisant ses sources d’inspiration dans les arts plastiques, le théâtre, la danse, la musique et la peinture…, un genre discursif avec des caractéristiques linguistiques et rhétoriques spécifiques, et un dispositif théorique extrêmement puissant pour analyser le monde. »

Luca Greco, « Performance », Publictionnaire. Dictionnaire encyclopédique et critique des publics, 2018, paragraphe 1, [en ligne] : http://publictionnaire.huma-num.fr/notice/performance (19/05/21)


« En anglais, ce terme peut désigner plusieurs formes artistiques et pas nécessairement subversives ou avant gardistes : i) an act of presenting a play, concert, or other form of entertainment: ‘Don Giovanni had its first performance in 1787’; ii) an act of performing a dramatic role, song, or piece of music: ‘Bailey gives a sound performance as the doctor’.

De ce fait, lorsqu’on utilise le terme « performance » en anglais, on peut faire référence à une action menée par l’artiste italienne Gina Pane, mais aussi à un concert de Madonna ou joué par un orchestre symphonique ou encore à une pièce de théâtre mettant en scène des auteurs aussi divers que William Shakespeare ou Claudine Galea. Comme on vient de le voir, le terme performance peut être appréhendé selon au moins trois cadres interprétatifs : le genre artistique, le genre discursif et le dispositif théorique. »

Luca Greco, « Performance », Publictionnaire. Dictionnaire encyclopédique et critique des publics, 2018, paragraphes 18-20, [en ligne] : http://publictionnaire.huma-num.fr/notice/performance (19/05/21)


« Performances occur in many different instances and kinds. Performance must be construed as a “broad spectrum” or “continuum” of human actions ranging from ritual, play, sports, popular entertainments, the performing arts (theatre, dance, music), and everyday life performances to the enactment of social, professional, gender, race, and class roles, and on to healing (from shamanism to surgery), the media, and the internet. Before performance studies, Western thinkers believed they knew exactly what was and what was not “performance.” But in fact, there is no historically or culturally fixable limit to what is or is not “performance.” Along the continuum new genres are added, others are dropped. The underlying notion is that any action that is framed, enacted, presented, highlighted, or displayed is a performance. Many performances belong to more than one category along the continuum. For example, an American football player spiking the ball and pointing a finger in the air after scoring a touchdown is performing a dance and enacting a ritual as part of his professional role as athlete and popular entertainer. »

Richard Schechner, Performance studies, Londres : Routledge, 2013 [2002], p.2


« L’action (performance) signifie engagement de la personne dans son entièreté, organique et mentale, biologique et cognitive, impliquée depuis l’enfance dans une interaction constante avec le monde sur lequel elle agit et qui l’agit. Le mot porte en lui la faculté d’évoquer la créativité, l’imaginaire, la réactivité des gens ordinaires en société. »

Jean-Marie Pradier, « De la performance theory aux performance studies, From Performance Theory to Performance Studies », Journal des anthropologues, 148-149, p.293, [en ligne] : http://journals.openedition.org/jda/6707 (06/05/21)


« Something “is” performance when historical and social context, convention, usage, and tradition say it is. […] One cannot determine what “is” a performance without referring to specific cultural circumstances. There is nothing inherent in an action itself that makes it a performance or disqualifies it as a performance. From the vantage of the kind of performance theory I am propounding, every action is a performance. But from the vantage of cultural practice, some actions will be deemed performances and others not ; and this will vary from culture to culture »

Richard Schechner, Performance Studies: An Introduction, Londres : Routledge, 2002, p. 30

Arts contemporains
Inge Linder-Gaillard, Directrice artistique et pédagogique, ESADMM, France

Historienne de l’art de formation d’origine américaine, j’étudie, travaille, fais de la recherche en art contemporain depuis près de trente ans.

Au Magasin – Centre national d’art contemporain de Grenoble, où j’ai été responsable des expositions, les performances pouvaient faire partie du programme que l’équipe mettait en œuvre avec les artistes. À l’Université Pierre Mendès France à Grenoble, où j’enseignais l’histoire de la performance, on se penchait sur ses multiples incarnations à travers le 20e siècle pour l’examiner. À l’École Supérieure d’Art et Design •Grenoble •Valence où j'étais directrice du site de Grenoble, les performances se déployaient de manière expérimentale dans un environnement à fois encadré et libre. Dans mes recherches personnelles, je me suis intéressée en particulier à l’œuvre de l’artiste Gina Pane.

Dans le champ des arts plastiques, le travail performatif, appelé de manière courante « la performance », est reconnue comme un genre parmi d’autres actes de création. En histoire de l’art, cette nomenclature permet de prendre en compte des œuvres créées depuis le début du XXe siècle par les avant-gardes européennes tels les futuristes ou dadaïstes, comme nous le raconte RoseLee Goldberg en 1970.

Depuis plus d’un siècle donc (voire plus selon certaines analyses), les artistes plasticien.n.es mobilisent le corps humain, matière première d’une performance, pour penser et produire des œuvres d’une diversité vertigineuse.

Une performance se doit « d’avoir lieu » dans un espace-temps quelconque. Elle peut avoir lieu une seule fois ou plus. Sa durée peut être d’une seconde comme de 24 heures ou plus. Cette durée se passe quelque part, elle « a lieu » : dans une pièce quelconque comme sur une scène comme sur la place publique, comme dans un placard. En ceci, une œuvre performative se différencie d’une peinture ou une sculpture, qui se pose dans l’espace ; même si certaines théories exigent que l’œuvre « statique » n’ait pas lieu sans spectectateur.ice et qu’en cela toute œuvre de création serait expérientielle tout comme certains protocoles de création entrepris pour aboutir à une œuvre seraient considérés comme performatifs. Cela vaut également pour une œuvre vidéographique ou enregistrement sonore (qui peut être un enregistrement d’une performance…). Ces œuvres-objets peuvent faire partie d’une performance en tant qu’éléments qui contribuent à son environnement, au dispositif mis en place et mobilisés au cours d’une performance. Des éléments-objets de tous genres, nombreux ou pas, peuvent faire partie d’une performance.

Dans une performance, il peut y avoir une personne (voire aucune personne visible) comme il peut y avoir une foule. L’artiste-auteur.ice-concepteur.ice (ou les artistes) peut participer ou ne pas participer. L’artiste peut parler (chanter) ou pas, bouger (danser) ou pas. Il peut y avoir de la musique ou d’autres éléments sonores ou pas. Il peut y avoir une partition, un scénario ou pas. Chaque moment peut être prévu et répété jusqu’à atteindre un rendu très spécifique ou être totalement improvisé (même si une improvisation pouvait aussi être considéré comme un rendu « spécifique »), si cela est l’intention de l’artiste.

La volonté peut être qu’aucune trace ne soit laissée ou enregistrée ou à l’inverse que la moindre trace soit conservée et la performance enregistrée de multiples modalités techniques ou technologiques. Ces traces ou enregistrements peuvent être considérés comme de la matière brute pour faire d’autres œuvres qui se qualifient d’autres manières (du film cinématographique fictionnel ou de caractère documentaire, de la photo ou de la vidéo, d’œuvre sonore, d’éléments d’une installation ou d’autres dispositifs…). Gina Pane, par exemple, faisait faire des photographies très précises pendant ses performances. Elle présentait certaines de ces photographies comme des œuvres à part qu’elle qualifiait de constats. (Voir mon essai « De Situation idéale à Little Journey, un court voyage dans la « sémiotique sans modèle » des actions de Gina Pane »).

Les possibles sont tellement multiples, ils sont presque inimaginables. Et nous comptons sur les artistes à chaque fois pour proposer des performances que nous n’attendions pas, et même, de rejeter le mot performance. Tel était le cas de Gina Pane, qui privilégiait le mot Action pour décrire ses œuvres performatives qui se déployaient au sein d’un courant des années 1970 qui s’appelait l’art corporel.

Pour prolonger :

Inge Linder-Gaillard, « De Situation idéale à Little Journey, un court voyage dans la « sémiotique sans modèle » des actions de Gina Pane » Gina Pane, Carquefou : Frac Pays de la Loire, Dijon : Les Presses du réel, 2011, édition française / « From Situation idéale to Little Journey, A Short Voyage Into the “Unprecedented Semiotics” of Gina Pane’s Actions », Gina Pane, Carquefou : Frac Pays de la Loire, Dijon : Les Presses du réel, 2011, édition anglaise.

Pour citer : Inge Linder-Gaillard, « Performance », Performascope : Lexique interdisciplinaire des performances et de la recherche-création, Grenoble : Université Grenoble Alpes, 2021, [en ligne] : http://performascope.univ-grenoble-alpes.fr/fr/detail/177859

Marvin Carlson, Performance. A Critical Introduction, Routledge : Londres, 2018 [1996]

Joseph Danan, Entre théâtre et performance, Nanterre : Actes Sud-Papiers, 2016

André Helbo dir., Performance et savoirs, Paris : De Boeck Supérieur, 2011

Jean-Marie Pradier, « De la performance theory aux performance studies, From Performance Theory to Performance Studies », Journal des anthropologues, 148-149, pp.287-300 [en ligne] : http://journals.openedition.org/jda/6707 (06/05/21)

Richard Schechner, Between theater and anthropology, Philadelphie : University of Pennsylvania Press, 1985

Richard Schechner, Performance studies, Londres : Routledge, 2013 [2002]