Empathie Empathy

— Légende

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Perspectives

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Bibliographie

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Définition

L’empathie désigne de façon générale l’aptitude d’une personne à s’identifier à autrui dans un acte de compréhension et de ressenti partagé. Différent·e·s types/formes d’empathie sont distinguées : l’empathie affective (ou émotionnelle), l’empathie radicale, l’empathie cognitive et l’empathie somatique.

Pour citer : « Empathie », Performascope : Lexique interdisciplinaire des performances et de la recherche-création, Grenoble : Université Grenoble Alpes, 2021, [en ligne] : http://performascope.univ-grenoble-alpes.fr/fr/detail/177821

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Date de création : 2021-06-14.

Dernière modification : 2022-06-29.

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Citations

Bibliographie

« When research technique such as participant observation and other similar qualitative methods are employed, the researcher often attempts to see the world from the participants’ perspective and tries to develop an ability to take the role of the “other.” Such empathetic role-taking between humans suggests that most people have a desire to understand what life is like for those who are different from themselves. Qualitative researchers who employ such methodologies involving interviewing, observation, and ethnography do so to better understand how participants interpret and give meaning to their own experiences. »

Lisa M. Given, The SAGE Encyclopedia of Qualitative Research Methods, Londres : Sage, 2008, p.252

« Elle renvoie à l’expérience du miroir. Elle implique un contact direct ainsi que tous les gestes expressifs, tels que le sourire, le regard croisé et les expressions faciales, par lesquelles j’atteste accepter de faire de l’autre un partenaire d’interaction émotionnelle et motrice. »

Serge Tisseron, Benoît Virole, Philippe Givre, Frédéric Tordo, Mathieu Triclot, Yann Leroux, Subjectivation et empathie dans le monde numérique, Paris : Dunod, 2013, p.13

Études en littérature
Marie Mianowski, Univ. Grenoble Alpes, ILCEA4, 38000 Grenoble, France

Professeure de littératures anglophones, je travaille sur les représentations de l’espace et du temps dans la littérature irlandaise et anglophone des pays de l’ancien empire britannique.  Au fur et à mesure, mon regard de lectrice a évolué vers une lecture plus concrète et matérielle des représentations, portant mon attention vers la manière dont les idées de lieu (« place » en anglais) et de « home » étaient représentées, en particulier dans des littératures où les questions de migration sont centrales. Mais il m’a fallu plusieurs détours avant de comprendre comment l’empathie pouvait enrichir mes relations avec les autres et nourrir mes lectures littéraires et donc mon enseignement.

J’ai beaucoup travaillé sur les nouvelles et romans de Colum McCann, auteur irlandais né à Dublin en 1965, installé à New York depuis les années 1990, dont l’écriture s’efforce très souvent de tisser des liens entre différentes époques et différents personnages en un même lieu, mêlant personnages de fiction et personnes ayant réellement existé (New York City dans This Side of Brightness (1998) et Let the Great World Spin (2009), Belfast, New York City et Terre-Neuve dans TransAtlantic (2013), Jérusalem dans Apeirogon  (2020)). Ses textes sont traversés par le tragique de la vie mais aussi l’espoir : espoir pour les personnages dans la manière dont les différents romans tissent les récits et croisent les destins ; espoir pour le lecteur et pour le monde car ces romans ouvrent toujours sur un horizon optimiste.

Pour Colum McCann, tout individu porte en lui une histoire à raconter : prendre le temps de raconter ses histoires et d’écouter celle des autres, c’est contribuer à rendre le monde meilleur et à construire la paix. En 2013, il a donc fondé l’association Narrative4 qui a pour objectif de créer les conditions d’échanges d’histoires entre individus de toutes origines sociales, nationales, religieuses, et de promouvoir ce qu’il appelle l’empathie radicale (« radical empathy »). Le principe est simple et terriblement efficace : des binômes sont créés au hasard dans un groupe d’une dizaine de volontaires assis en cercle et menés par deux animateurs. Après avoir rappelé les règles de bienveillance et d’écoute active et respectueuse qui doivent à tout moment prévaloir, l’animateur principal forme les binômes et annonce le thème de l’échange. Chaque binôme se retire à l’écart et échange une histoire personnelle sur le thème imposé. Au bout de vingt minutes environ le cercle se reforme et chaque membre de binôme raconte au groupe et à la première personne du singulier l’histoire qui lui a été confiée. C’est le déplacement intérieur que nécessite le récit oral à la première personne du singulier qui signe véritablement l’originalité de cet échange d’histoires : saisir concrètement la responsabilité que représente le fait d’endosser l’histoire personnelle d’autrui et de la raconter en public. L’expérience vécue de l’empathie dans le cadre de cet échange d’histoires a des répercussions multiples à la fois dans la relation au sein du binôme mais aussi au sein du groupe tout entier.

En décembre 2018 je suis allée me former à l’animation d’ateliers de ce type à Limerick à l’antenne irlandaise de l’association Narrative 4 et j’ai depuis animé des ateliers d’échanges d’histoires et d’initiation à l’empathie radicale dans des contextes différents (étudiants de Master, collègues universitaires, personnes immigrées à Grenoble) en présentiel et en distanciel. En particulier, je trouve que l’échange d’histoires selon le principe de Narrative 4 (restitution de l’histoire confiée par le partenaire à la 1re personne du singulier) est une bonne introduction pour le séminaire de littérature transculturelle que j’enseigne en Master, puisque les textes que nous étudions sont des textes écrits dans une langue autre que la langue maternelle des auteurs.

Les notions d’empathie et de compassion sont souvent utilisées de manière interchangeable. L’empathie radicale n’est pas une façon d’éprouver les émotions de son ou de sa partenaire ; cela n’est pas une manière de souffrir avec cette personne, mais de comprendre ce qu’elle ressent tout en gardant une certaine distance émotionnelle. En revanche par le déplacement qu’elle induit, l’empathie opère un décentrement qui crée une dynamique hors de soi et élargit le champ de la compréhension du monde. En ce sens elle permet aussi d’éviter ce que Chimamanda Ngozi Adichie appelle « Le danger d'une histoire unique ». De mon point de vue l’empathie n’est donc pas une vertu magique, c’est une qualité humaine à cultiver, parmi d’autres, et c’est un point d’appui éthiquement fondamental dans la vie et pédagogiquement utile en littérature.

Pour citer : Marie Mianowski, « Narration », Performascope : Lexique interdisciplinaire des performances et de la recherche-création, Grenoble : Université Grenoble Alpes, 2021, [en ligne] : http://performascope.univ-grenoble-alpes.fr/fr/detail/177557

Patricia Attigui, Alexis Cukier dirs., Les paradoxes de l’empathie. Philosophie, psychanalyse et sciences sociales, Paris : CNRS Éditions, 2011

Alain Berthoz & Gérard Jorland, dirs, L’Empathie, Paris : Odile Jacob, 2004

Chloé Charliac, « La posture empathique comme fondement méthodologique pour l'étude de la communication émotionnelle dans le domaine de la danse contemporaine », Société. Revue de sciences humaines et sociales, 125, 3, 2014, pp.81-89, [en ligne] : https://doi.org/10.3917/soc.125.0081 (06/05/21)

Edith Stein, On the problem of empathy, traduit par Waltrus Stein, La Haye : Springer, 1964