« L’écoute est, tout à la fois, un comportement, une attitude, impliquant autant, au niveau du sujet, une disposition et une disponibilité du corps, qu’une attention soutenue de l’esprit, soucieuse de logique et de cohérence, mais aussi stimulée, provoquée et motivée par une affectivité inévitablement plus capricieuse ; l’ensemble témoignant l’hypothèse explicite d’un autrui distinct de soi-même, également source d’intentionnalités et de capacités. En ces sens, l’écoute implique le « penser ». On peut alors la représenter soit en termes de procédures (comment susciter, obtenir, établir, maintenir, optimiser, témoigner, l’attitude adéquate ?) – qui deviendront alors techniques, instrumentales, méthodologiques –, soit en termes de processus (qu’éprouve-t-on, que vit-on à la faveur de tels mouvements psychiques ?). Tandis que ces derniers (processus) s’inscriront dans une temporalité-durée qui assurera leur élaboration et leur maturation lentes, en obéissant à un devenir plus biologique que mécanique, les autres (procédures) seront plus construites, plus rationnelles, plus techniques, plus modélisées, plus découpées, de la sorte plus spatialisées, façons de faire, finalement, pour les unes, plus que façons d’être et d’exister, pour les autres. »
Jacques Ardoino, « L'écoute (de l'autre) », Nouvelle revue de psychologie, 6, 2, 2008, p.291, [en ligne] : https://doi.org/10.3917/nrp.006.0291 (20/05/21)
« Être à l’écoute en danse, c’est le plus souvent pouvoir danser avec l’autre, être profondément avec lui, tant dans une relation tactile (duos, portés, etc.) que dans des relations chorégraphiques à travers l’espace. Il s’agit donc d’une ouverture perceptive où domine le mode kinesthésique et proprioceptif (sens de son propre mouvement et de son propre équilibre). […] Dans cette écoute, le mode tactile est dominant, et surtout,elle ne vise aucune interprétation : il ne s’agit pas d’interpréter les gestes de l’autre (ou de les lui faire comprendre), mais de les lui rendre accessibles. Cette réappropriation est souvent appelée « prise de conscience » (awareness en anglais). Une telle écoute est donc attachée non pas à une herméneutique, mais à une présence et une expérience, elle se situe sur le registre phénoménologique et vise une transformation de l’expérience. »
Isabelle Ginot, « Écouter le toucher », Chimère, 78, 2013, p.88-89, [en ligne] : https://doi.org/10.3917/chime.078.0087 (06/05/21)